Plongeant au plus profond de leur univers électro que viennent enrichir des influences trip-hop flamboyantes (les positionnant ainsi dans la même famille que Massive Attack ou Trentemøller), armés de leurs claviers et séquenceurs, les deux hémisphères de The Oversleep, parfois en trio lorsque s’invite sur deux titres le rappeur Miscellaneous (Chinese Man, Chill Bump) , voire plus lorsque c’est le groupe bordelais MamaKilla qui vient poser d’autres sonorités pour brouiller une piste, ouvrent devant nous les portes d’un monde où la musique envoûte autant que les mots font sens, où la voix de Duende, tantôt planante, tantôt nerveuse, nous invite à aller au-delà de cet endormissement, cette passivité dans lesquels on se complaît souvent, pour ouvrir – enfin ! – les yeux sur l’état du monde qui nous entoure, sans pour autant nous imposer un discours sociétal ou politique, préférant de loin laisser libre court à nos impressions pures, nos sentiments fous, nos propres interprétations plus ou moins vraies.
De ce puzzle émotionnel naît cet album, «Insomnia», qui, après un premier EP «The Awakening», confirme le goût du duo bordelais pour les univers élargis, les mondes altérés, où la musique, atmosphérique et atypique, se joue des conventions et des formats pour mieux nous envelopper afin de nous inviter autant à rêver qu’à danser. En assemblant pour nous les douze pièces de cette image fractionnée de notre présent, voire de notre futur, The Oversleep trace un chemin original, qui fait de nos esprits les réceptacles de vibrations inédites.
En suivant avec eux cette route parsemée de creux et de bosses, nous est offert le luxe rare de pouvoir, selon notre bon vouloir, soit profiter pleinement de l’énergie viscérale qui se dégage de ces compositions pour laisser nos corps s’exprimer comme ils le veulent ou, a contrario, de nous laisser porter par la vague et rêver, tout simplement. Deux possibilités, parmi d’autres tant cet album sait surprendre au fil des écoutes, qui font de cet opus de The Oversleep un objet musical à part, loin des cases préformatées mais pour autant sans frontières infranchissables, qui subjugue autant qu’il bouscule, envoûte autant qu’il libère, et laisse, au bout de l’expérience aussi rêveur que comblé, aussi séduit que transporté.